Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Publié par SUPAP-FSU

Depuis plus d'un an, la pandémie liée à la Covid-19 a révélé les vulnérabilités de notre système de santé, ainsi que le mérite des professionnels de santé qui œuvrent souvent beaucoup avec peu de moyens, et ce au prix d’un épuisement constaté par tous. 

A leur image, le métier souvent mal connu des psychologues a été mis en lumière comme une ressource essentielle, démontrant toute sa légitimité à soutenir la population et sa résilience dans cette crise sanitaire.

A Paris, la création d'une Direction de la Santé Publique a été annoncée comme un projet phare de la mandature de Madame la Maire, piloté par Madame Anne Souyris, son adjointe en charge de la santé publique et des relations avec l’APHP, de la santé environnementale, de la lutte contre les pollutions et de la réduction des risques.

Sous couvert d’améliorer le service rendu aux parisiens, ce projet met en exécution une politique territoriale de décentralisation qui mutualise les moyens, en particulier humains, à budget constant.

Dans ce cadre, l’ensemble des professionnel.le.s de PMI initialement rattachés à la Direction des Familles et de la Petite Enfance seront désormais intégrés à la Direction de la Santé. La Ville profite de ce changement d’organisation pour modifier la hiérarchie des psychologues, ce à quoi ils sont fermement opposés.

Cela fait, en effet, plus de 60 ans que les psychologues de la petite enfance sont au service des parisien.ne.s, et 18 ans qu’ils sont sous l’autorité hiérarchique d’une psychologue coordinatrice.

Jusqu’alors, la ville pouvait s’enorgueillir de cette organisation originale et créative qui était à l’avant-garde. Or les décisions actuelles de la Maire de Paris vont faire table rase de cette organisation, inédite au plan national et enviée jusqu’alors par de nombreux psychologues.

Les psychologues de la Ville de Paris rappellent que l'encadrement hiérarchique (et pas seulement technique au sens d’un référent métier), par un.e psychologue, permet :

  1. D’harmoniser les pratiques, de développer des outils et des méthodes communes dans un souci constant d’efficacité et d’adaptation aux besoins des familles. Ceci du fait de la légitimité et des compétences en psychologie clinique d’un encadrement des psychologues exercé par un pair,
  2. De garantir un exercice professionnel conforme à leur code de déontologie. Sa fonction est ici de préserver l’éthique des pratiques professionnelles à destination des familles,
  3. De favoriser l’autonomie de pensée et d’action, ainsi que la prise de recul nécessaire pour offrir un service rendu de qualité au public. Cette organisation a d’ailleurs prouvé son efficience lors de moments particuliers tels que les attentats de 2015 et, plus récemment, dans le cadre de la crise sanitaire de la Covid 19. L’organisation coordonnée par une psychologue a permis une grande réactivité du corps des psychologues sur l’ensemble du territoire parisien. Elle a également permis la création d’une Unité Mobile d’Intervention Psychologique (UMIP) qui traite du psycho-traumatisme, d’un dispositif mobile de consultation interculturel, ou encore d’entretiens psychologiques par téléphone via le 3975, à l’attention de tou.te.s les parisien.ne.s,
  4. De garantir l’égalité d’un libre accès des familles parisiennes au « service public psychologique » proposé par la PMI. Seul.e un.e psychologue peut, en effet, déterminer ce qui relève de sa compétence pour accompagner des familles en PMI et en crèche. D’ailleurs, ce public ne trouve pas toujours de réponse adaptée à ses besoins au sein des structures de santé mentale et/ou préfère être suivi en PMI.

Comment interpréter le choix de la Ville de démanteler une organisation qui fonctionne, autrement que comme une méconnaissance de cette discipline, voire un mépris de son histoire ? Comment ne pas voir une régression des pouvoirs publics pour cette profession en la mettant sous tutelle d’un médecin, ce qui ne présentera aucune plus plus-value réelle pour les parisiens ?

Dans la logique gestionnaire de mutualisation des agents de la Ville, les psychologues devront-ils pallier l’absence de politique de recrutement et de pérennisation des postes par un redéploiement des moyens existants ? Cela se traduirait immanquablement par des réponses « au coup par coup », injustifiables psychologiquement, et non plus par une présence régulière dans les crèches comme cela se fait actuellement. 

Comment comprendre en particulier la prise de risque de la Ville lorsque l’on sait que les psychologues sont, en crèche et pour les assistantes maternelles, des acteurs/actrices majeur.e.s dans la formation continue aux bonnes pratiques professionnelles et dans le dépistage des troubles précoces de l’enfant ?

Comment comprendre cette politique des ressources humaines dans une période où le service de PMI constate et déplore le manque d'attractivité qu'il représente pour beaucoup de professionnels ?

Les psychologues de la Ville de Paris ne sont d’ailleurs pas les seuls à défendre leur cadre de travail. En effet, alors que les psychologues sont habituellement des professionnels discrets et peu militants, ils se mobilisent actuellement dans toute la France pour refuser la para-médicalisation du métier.

Avec la pandémie, l’État a en effet proposé de rembourser sur prescription médicale 10 séances de 30 minutes rémunérées 22 euros la séance (tarif brut horaire d’un.e psychologue de la fonction publique hospitalière), puis 32 euros, renouvelable une fois. Cette proposition sous-évaluée qui a été élaborée sans les professionnel.le.s du secteur témoigne de la totale méconnaissance de leur conditions, techniques, et outils de travail. C’est d’autant plus aberrant qu’en faisant entrer les psychologues dans un parcours de soin coordonné, on estime qu’un médecin sera à-même d’évaluer la nécessité d’un soin psychologique, alors qu’il n’est absolument pas formé dans ce domaine, et que seul le psychologue est expert en matière de psychologie de part ses formations universitaires et continues.

La para-médicalisation des actes de psychologie rompt ainsi avec l’idée d’un accès libre et direct au psychologue, et la codification actuelle des actes empêche de proposer une méthode de soin complète quel que soit le modèle (thérapie cognitive, systémique, psychanalytique, etc.).

Par ces logiques administratives et politiques qui aboutiraient à la para-médicalisation des psychologues, il ne fait pas de doute que la Ville envoie un signal négatif qui aura des conséquences sur la qualité du service rendu aux familles parisiennes.

Les psychologues de la Ville de Paris sont révolté.e.s et sont déterminé.e.s à défendre leur discipline face à la non-reconnaissance par la Mairie de leur spécificité métier et à la volonté de transformer leur organisation interne à l’occasion de cette restructuration de service.

Une intersyndicale réunissant les syndicats CGT-Petite Enfance 75, SUPAP-FSU, UCP-Petite Enfance, UNSA, CFTC, FO et CFDT est constituée autour du soutien des psychologues et de leurs revendications. L’intersyndicale demande à être reçue par l’administration et les Elu.e.s concerné.e.s.

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article